En été, Paris offre aux visiteurs pas moins de 490 parcs, jardins et squares municipaux qui sont autant de lieux de découverte et de détente. Parmi ces sites, en voici trois parmi les plus célèbres, riches d’une petite et grande Histoire que nous raconte Frédérick Gersal dans la dernière édition de son guide Paris, 110 lieux mythiques*.
Le Jardin du Luxembourg
C’est peut-être le plus beau jardin à la française de la capitale et pourtant, le Luxembourg est dû à un architecte florentin, proche des Médicis.

Le jardin du Luxembourg est le jardin du palais qui abrite aujourd’hui le Sénat. Construit entre 1615 et 1620, cet édifice est né de la volonté de Marie de Médicis de posséder une demeure digne de sa fonction (elle est alors régente du futur roi Louis XIII). Elle souhaite très vite l’agrémenter de jardins lui rappelant ceux de son Italie natale. En 1617, elle échange certaines parcelles avec les Chartreux. Plus tard, plusieurs terrains contigus seront achetés pour agrandir le domaine qui finit par atteindre pas moins de 30 ha ! Mais, après cette phase d’expansion, au fil des siècles, le jardin va être grignoté pour tracer de nouvelles rues et bâtir de nouvelles habitations. Aujourd’hui, le parc occupe près de 25 ha, que certains des plus talentueux jardiniers et paysagistes du royaume ont magnifiquement aménagés entre le XVIIe et le XIXe siècle et où Marie de Médicis a fait planter 2 000 ormes.
Des architectes de renom
Parmi les artistes qui ont œuvré dans ce jardin figure Thomas Francini, un Florentin arrivé en France dans le sillage de Marie de Médicis. C’est à lui que l’on doit nombre de terrasses et de parterres de ce jardin à la française, ainsi que le fameux bassin circulaire qui fait aujourd’hui la joie des enfants et de leurs bateaux ! D’autres talents ont été mis à contribution dans le jardin du Luxembourg, tels que Boyceau de La Barauderie qui participa lui aussi au tracé des parterres, l’architecte Jean-François Chalgrin à qui l’on doit certaines perspectives, ou, plus récemment, l’ingénieur Alphand chargé par le baron Haussmann, à la fin du XIXe siècle, d’administrer les grandes promenades de la capitale. Outre les parterres, ce sont les ornementations et les divertissements qui font la spécificité de ce jardin. Au fil des déambulations, on découvre l’Orangerie – transformée en musée – un kiosque à musique, une roseraie, des ruches, de terrains de tennis, un jardin d’enfants, un manège, un théâtre de marionnettes et de nombreuses sculptures, dont la fameuse fontaine Médicis (…)
Le Jardin des Plantes
Installer près de la Seine un jardin cultivé dédié à la recherche scientifique : quelle belle idée !

Ce que l’on nomme aujourd’hui Jardin des Plantes s’appelait à l’origine Jardin royal des plantes médicinales. En 1635, le roi Louis XIII décide d’aménager un espace vert entre la Bièvre, rivière aujourd’hui enterrée et la rue du Faubourg Saint-Victor (l’actuelle rue Geoffroy-Saint-Hilaire). C’est presque un phénomène de mode ! Il faut savoir que, depuis le XVIe siècle, sous l’impulsion italienne, l’Europe multiplie la création de jardins botaniques, le plus souvent près des facultés de médecine. Louis XIII fait donc acheter un château entouré de ses terres ; Guy de La Brosse, médecin du roi, en est le premier responsable (…) Dès le début, ce lieu constitue un réservoir de plantes dotées de vertus curatives. Il est aussi le cadre de cours gratuits de chimie, botanique et anatomie du règne animal dispensés en langue française aux futurs médecins et apothicaires.
Un personnage clé : Buffon
Au XVIIIe siècle, le château est surélevé d’un étage pour accueillir un cabinet d’histoire naturelle destiné à recevoir les collections royales de zoologie et de minéralogie. Depuis la fin du Moyen-Âge, les rois et les princes possèdent en effet de véritables collections d’animaux et de plantes pour afficher leur toute puissance et leurs richesses. C’est dans cette logique qu’en 1718, le Jardin royal des plantes médicinales devient Jardin royal des Plantes puis Jardin du roi ! Quelques années plus tard, en 1739, sous le règne de Louis XV, un nouvel intendant est nommé, le comte Georges Louis Marie Leclerc de Buffon. Ce grand travailleur est à la fois un homme d’affaires qui gère ses forges, un philosophe, un naturaliste et un écrivain (son œuvre majeure est la célèbre Histoire naturelle générale et particulière). Buffon conservera sa charge pendant près d’un demi-siècle (…)
Le Muséum d’Histoire Naturelle
Quelques mois après la mort de Buffon, la Révolution transforme le Jardin du roi en Jardin national. En 1793, la Convention fonde, sous la pression de scientifiques, le Muséum national d’histoire naturelle. Un an plus tard, la ménagerie est créée à la suite d’une décision officielle interdisant les spectacles d’animaux vivants dans Paris. À ces premières confiscations s’ajoutent les animaux provenant des ménageries royales et princières. L’engouement populaire est immédiat. Le public se presse pour apercevoir des animaux exotiques, parmi lesquels la lionne Constantine ou encore les éléphants Hans et Parqui, sans oublier la célèbre girafe Zarafa offerte au roi Charles X par le vice-roi d’Egypte.
Le Parc Montsouris
Inspiré par le modèle londonien, Napoléon III décida sous le Second Empire, d’aérer la capitale grâce à l’aménagement de parcs et de jardins. Parmi eux figure le magnifique parc Montsouris.

Pendant méridional du parc des Buttes-Chaumont, le parc Montsouris est le deuxième plus grand espace vert de Paris intra-muros et constitue un lieu de promenade incontournable. Il a été créé au XIXe sous l’impulsion de l’empereur Napoléon III et du baron Haussmann. Sous la direction de l’ingénieur Jean-Charles Adolphe Alphand, des travaux de grande ampleur sont entrepris en 1867 ; ils ne seront achevés qu’en 1878. Ce long intervalle est dû notamment à la guerre contre la Prusse qui fait rage en 1870 ainsi qu’à la nature du sol, très accidenté. Il suffit d’ailleurs d’examiner la géographie actuelle du parc, avec ses allées courbes et circulaires, ses dénivelés et ses perspectives, pour comprendre la complexité de la tâche ayant incombé aux architectes et aux bâtisseurs (…) À la surface, ce n’est guère mieux : les terrains vagues sur lesquels ont été installés des moulins à vent en vue de produire la farine pour les boulangers de Paris, sont autant d’obstacles à la création du parc. Des tonnes de céréales et de farine y sont entreposées et attirent inévitablement des milliers de souris – qui ont finalement donné leur nom au parc !
Une harmonie subtile entre faune et flore
Le comblement des carrières et le nettoyage des terrains n’est qu’une partie de la tâche titanesque qui échoit aux concepteurs du parc, au premier rang desquels l’ingénieur Alphand. Il faut également approvisionner le lieu de terre végétale nécessaire aux plantations, dessiner des allées, créer un relief et réaliser une cascade artificielle dont les eaux se jetteront dans un lac, lui aussi artificiel. Grâce à d’incroyables efforts, le parc Montsouris ouvre enfin ses portes en 1878. Aujourd’hui, on peut y découvrir plusieurs centaines d’arbres parmi lesquels des cèdres, des platanes, des hêtres, des poiriers ou encore des kakis.
Le parc sert aussi de cadre à de nombreuses sculptures, notamment La Carrière ou La Colonne de la Paix armée que l’on doit au sculpteur Jules Coutan ainsi que la mire de l’Observatoire qui date de 1806, autrement dit du règne de Napoléon 1er dont le nom a été effacé sur le socle. Au détour d’une allée, on découvre la colonne pyramidale érigée en souvenir de l’expédition Flatters, qui n’est jamais revenue (…) Le parc Montsouris recèle également un kiosque à musique et même un restaurant, sans oublier le théâtre de Guignol qui enchante petits et grands !
* Textes extraits du livre Frédérick Gersal raconte Paris 110 lieux mythiques (Hachette)
Jardin du Luxembourg : rue de Vaugirard Paris 6e
Jardin des Plantes : place Valhubert Paris 5e – Tél. 01 40 79 56 01 – www.jardindesplantes.net
Parc Montsouris : boulevard Jourdan Paris 14e
Frédérick Gersal
« Paris nous raconte l’histoire de tout un Peuple »
Tentation – Vous décrivez dans ce livre la petite et la grande histoire de plus de 100 sites parisiens. Qu’est-ce qui vous fascine le plus dans cette ville ?
Frédérick Gersal – Cette ville est comme un aimant, les yeux et le cœur ne parviennent pas à s’en détacher. Il y a certes les lieux magiques et magnifiques que je raconte dans ce livre, mais il y a aussi cette colonne vertébrale, la Seine et puis c’est un florilège de l’histoire de l’architecture, bref cette ville nous raconte l’Histoire de tout un Pays, toute une Nation, tout un Peuple… Avec ses joies et ses peines, ses fêtes et ses révolutions, ses amours et ses haines, ses femmes et ses hommes. Paris possède un cœur qui bat à l’unisson de ses habitantes et de ses habitants et aussi de ses visiteurs, de ses touristes.
T – À vous lire, on se dit qu’il est dommage de parcourir la ville sans toute cette somme de connaissances. Vous arrive-t-il d’apprendre encore, de faire des découvertes ?
F.G – Bien au contraire, il faut aussi savoir la visiter, la découvrir avec l’étonnement, sans ce poids du passé qui peut parfois troubler l’image que donne cette ville. Des découvertes, on en fait à tout instant si l’on sait être curieux. Il n’y a pas si longtemps, pour une émission de télévision j’ai eu la chance d’entrer dans les magnifiques hôtels de la Caisse des Dépôts, ce fut un coup de foudre. Peut-être vous les ferai-je découvrir dans un autre livre, ou bien alors venez les visiter lors des prochaines Journées du Patrimoine…
T – Les Parisiens sont-ils de bons connaisseurs de leur histoire ?
F.G – Oui, comme toutes les Françaises et tous les Français en général, nous aimons tous notre histoire et notre patrimoine. Les Parisiens sont très attachés à leurs pierres, même si bien souvent ils passent devant sans toujours lever le nez en l’air. Pour retrouver cet engouement, il suffit de participer aux réunions publiques qui se déroulent parfois dans les arrondissements pour évoquer le devenir de tel ou tel bâtiment ou monument.
Frédérick Gersal raconte : Paris, 110 lieux mythiques
Hachette a eu l’excellente idée de publier une deuxième édition du guide de Frédérick Gersal consacré à la petite et grande histoire de plus de 100 grands sites parisiens. Avec sa verve et son humour, le journaliste y dévoile les secrets de grands monuments, les légendes qui ont marqué chaque quartier, les anecdotes qu’il faut connaître ! Rois et reines, artistes, grands architectes, espions et autres personnages insolites revivent sous sa plume et donnent irrésistiblement envie de redécouvrir la capitale… 12 €